Tortues au Québec
Encore Beaucoup à
Découvrir
Par Patrick Galois
Société d'Histoire Naturelle de la Vallée du St-Laurent
Le Québec abrite 8 espèces de tortues d'eau douce (et une espèce
marine en été). Celles-ci ont re-colonisé la province après la
dernière glaciation, soit il y a quelques 10 000 ans. La tortue peinte et la
chélydre serpentine sont communes et ont été particulièrement
étudiées en Amérique du nord. D'autres espèces plus rares
suscitent un
intérêt grandissant depuis quelques années, ne serait-ce que pour mieux
connaître leur répartition dans la province, une donnée de base pour leur
protection. La situation géographique particulière de ces populations au
Québec, soit la limite nord de leur répartition avec des conditions climatiques
hivernales rigoureuses, leur confère un intérêt supplémentaire.
Étant des animaux ectothermes (à sang froid), ces tortues ont dû s'adapter
à survivre à un long hiver et se reproduire durant une saison estivale courte,
comparées à leurs cousines du sud qui, par exemple, pourront produire deux
pontes par an au lieu d'une seule au Québec.
Actuellement, 4 espèces font l'objet de recherches plus intenses au Québec,
soit la
tortue des bois, la tortue mouchetée, la tortue géographique, et la tortue-molle
à épines. Ces études nécessitent la capture d'individus afin de les
marquer, et la radio-télémétrie. La première technique permet de
prendre des mesures sur les individus (poids, longueur de la carapace,..), de connaître la
structure des populations (sexe ratio, classes d'âge), et grâce aux recaptures de
documenter la croissance des individus et d'évaluer la taille des populations. La
télémétrie consiste à fixer un émetteur radio
sur la tortue et de la localiser en captant le signal à l'aide d'une antenne reliée
à un récepteur.
Cette technique permet donc de connaître les déplacements journaliers et
saisonniers des tortues. Généralement, l'étude se concentre sur la ponte,
l'hibernation, et l'alimentation, ces trois activités essentielles pouvant prendre place dans
trois
sites plus ou moins éloignés. Lors d'études menées sur la tortue
des bois dans l'ouest du Québec et en Mauricie, il a été observé
qu'une femelle peut parcourir plusieurs kilomètres pour aller pondre sur un site,
quelquefois utilisé par d'autres femelles, puis repartir ensuite vers son aire
d'été. Cett aire consiste en une parcelle de forêt pouvant se situer
à quelques centaines de mètres d'un cours d'eau.
Les tortues hibernent au fond de l'eau, la respiration pulmonaire étant
remplacée par une respiration cutanée suffisante pour maintenir l'organisme en
vie ralentie. Les tortues géographiques généralement se rassemblent dans
un site commun, une fosse de 4 à 6 mètres de profondeur avec une eau bien
oxygénée. Lors d'une étude menée au lac des Deux-Montagnes
(à l'ouest de l'île de Montréal), il est apparu que les femelles adultes se
regroupaient dans un même hibernacle (site d'hibernation) et pouvaient avoir parcouru
entre 5 et 10 km pour s'y rendre. Au lac Champlain, des femelles de tortues-molles à
épines peuvent utiliser des sites de ponte et des aires d'été
différents mais utiliser le même site d'hibernation, parcourant alors de 10
à 20 kilomètres pour s'y rassembler.
La seule population connue au Québec de tortues mouchetées se trouve dans
la région de l'Outaouais, avec des observations isolées dans la région de
Montréal. Lors de l'étude en Outaouais, grâce à la
radio-télémétrie, il a été possible de découvrir
que 2 mâles, contrairement aux femelles, n'avaient pas hiberné dans le
même site lors de deux hivers successifs. Tous ces travaux de recherche sont
réalisés par la collaboration de différents partenaires comme le
Ministère de l'Environnement et de la Faune du Québec, la
Société d'Histoire Naturelle de la Vallée du St-Laurent, Parcs Canada, le
Plan d'Action St-Laurent, la Fondation de la Faune du Québec, et des universités
comme l'Université du Québec à Trois-Rivières et
l'Université McGill.
La simple modification d'une berge peut détruire un site de ponte quelquefois
utilisé par plusieurs dizaines de femelles. Une course est donc engagée, celle-ci
passant
notamment par la sensibilisation des utilisateurs de ces habitats (propriétaires riverains
privés et publiques, pêcheurs, forestiers, randonneurs, ...). Chacun peut aussi
contribuer en rapportant, à des organismes tel que la Société d'Histoire
Naturelle de la Vallée du St-Laurent, des observations de tortues d'espèces rares
permettant ainsi de mieux connaître leur répartition. Lorsque vous vous
promènerez au bord de l'eau, ouvrez les yeux à la recherche de tortues se
chauffant au soleil, nageant à la surface de l'eau ou même, en automne, cherchez
sur les berges dégagées de végétation des fragments de coquilles
d'oeufs et des nids ouverts par un prédateur. De nombreuses questions demeurent, et
vous pouvez par vos observations contribuer à améliorer nos connaissances sur
les tortues du Québec. � vos jumelles!
� contacter en cas d'observation:
Société d'Histoire Naturelle de la Vallée du St-Laurent
21 125, Chemin Ste-Marie, Ste-Anne-de-Bellevue, Qc., H9X 3L2
Tél: (514) 457 9449
Télécopieur: (514) 457 0769
Courrier électronique: [email protected]
|